L'URBANISME DES SYSTEMES D'INFORMATION (USI)
Colloque du 24 juin 2 002 à LA SORBONNE
Quelle stratégie pour l'USI ?
De la métonymie informatique à la métaphore urbanistique
Pierre MARCHAND
EN EXERGUE...
Je remercie mes collègues dont la
pédagogie des textes produits pour ce << 24 juin >> m'a quelque peu
dessillé sur l'Urbanisme des Systèmes d'Information (USI).
N'étant pas un spécialiste, mon travail se borne, ici, à
une critique - possibles et limites - des positionnements des divers
éléments qui interviennent dans l'USI et des transformations
sous-jacentes à une telle association. Ce faisant, le thème
traité de la stratégie de l'USI accompagné d'un
modèle linguistique et d'exemples devrait pouvoir s'associer à
l'effort de réflexion et de compréhension des << enjeux,
approches et méthodes de l'USI >> pré-requis de ce Colloque.
==============
SOMMAIRE
1.- Prémices -
1.1.- Eléments d'une problématique
1.2.- Hypothèses de travail 1.3.- Présupposés 1.4.-
Cadrage de l'analyse de la stratégie de l'USI
2.- Outillage d'analyse-
2.1.- Bref rappel des idées de R. Jakobson
2.2.- Mode opératoire de la recherche
2.3- Approche globale des deux pôles de la recherche :
l'urbanisme et le groupe informatique.
2.3.1.- Expérience rapportée d'un urbaniste de terrain
<< Une brève histoire de notre temps... >>
2.3.2.- Saynète pour un groupe informatique
<< Un scénario comme un autre... >>
3.- Essai de modélisation-
3.1.- Représentation
3.2.- Dynamique proposée pour le schéma de la figure 1
3.3.- Questions pratiques pour l'amorce d'une dynamique stratégique
possible
3.3.1.- Du << non dit >>
3.3.2.- Couverture / SI versus hamac / USI
3.3.3.- Comment faire << décoller >> (A) de l'axe de
la métonymie ?
4.- Réflexion sur le passage à l'USI
5.- Au delà d'une conclusion.
MOTS CLES
- urbanisme -
système d'information - stratégie - pouvoir informatique -
organisation - entreprise - métaphore / métonymie -.
1.- Prémices -
1.1.- Eléments d'une problématique
On ne peut parler du hasard de la promotion de l'USI, même si celle-ci
semble apparaître inattendue. Tout d'abord, comme le fait remarquer
notre collègue J. Joskowicz, l'idée n'est pas neuve puisque
dès 1841 un certain Béroalde de Verville en avait signalé
l'intérêt. Cependant, un autre argument se présente,
plus récent et en quelque sorte banal puisque chacun peut en faire
la constatation : l'entreprise a profondément changé. De ce
monde théâtralement industriel comme l'était les usines
du Creusot au temps de la presse géante, on est passé à
l'acception quasi virtuelle, immatérielle selon certains, d'une
<< entreprise >> en quête d'une autre identité. Mais cette
transformation des entreprises est-ce dans le discours (management) ou la
quotidienneté ? Il est évident que nous sommes loin, aujourd'hui,
de la vision de << l'entreprise-objets >> , c'est-à-dire composée
de << briques >> telle que la formalisait H. Igor Ansoff, professeur de
gestion des entreprises au Carnegie Institute of Tehnology, dans
<< Corporate strategy >> (1965). Entreprise-Objets puisque l'auteur
attachait la plus haute importance à la synergie dont il définissait
l'effet par la formule : 2 + 2 = 5. En d'autres termes, la combinatoire astucieuse
de deux ou trois options stratégiques (diversification, élagage
de la gamme de produits, (absorption d'entreprise, participation... etc..) pouvait
conduire à produire plus que la bonne logique additionnelle.
D'un certain point de vue, les choses n'ont pas beaucoup changé.
On vend, on achète, on disjoint ou on rassemble des objets-entreprise.
Le niveau est plus << meta >> comme diraient les spécialistes
et les choses se sont accélérées. Curieusement, à la
même époque, Ludwig von Bertalanffy écrivait dans << General
System Theory >> (1968) que l'entreprise n'était pas
constituée de briques, mais d'éléments en interaction...
why not ? - C'était tout un autre programme. Ainsi, les attitudes
observées dans les entreprises sont toujours aussi mécanicistes :
mécanique de Newton, techniques de la boule de billard, de
la << pomme >> , du signal qui dominent le choix des hommes
et les incitent quelquefois à la stratégie et, paradoxalement,
aujourd'hui, on ne peut nier être en présence d'une
entreprise de l'information, du renseignement, de l'espionnage...stimulée
par un management agressif et compulsif. Y a-t-il eu changement ?
On est certainement plus proche d'une entreprise à l'organisation
<< maffieuse >> que de celle d'Ansoff. Faut-il voir dans
ce contexte ambigu l'amorce de la métaphore urbanistique ?
Dans la perspective de cette entreprise de l'information,
immatérielle s'il en est une ! comment aborder et définir une
ligne de stratégie pour l'USI. Telle est la problématique
posée dans cette recherche.
1.2.- Hypothèses de travail
Le fait de poser cette problématique implique qu'il existe pour
l'USI un mode de réponse, c'est-à-dire une ou des stratégies
possibles lui permettant d'assurer sa mission. Alors quelle mission ?
et en quoi diffère-t-elle de celle du SI ? Si cette mission diffère,
c'est que le mot Urbanisme associé à SI, dans le syntagme USI,
transforme le sens de ce dernier. Il s'agit peut-être d'un mode
original pour régénérer, soutendre, supporter autrement la
toile d'information de l'organisation ? En d'autres termes, il
est nécessaire de connaître les attentes des promoteurs de l'USI..
Mais il y a d'autres mais... !! En effet, est-ce qu'il est question
d'ajouter simplement au SI un adjectif qualificatif ou bien est-ce une
volonté délibérée d'y adjoindre un attribut
qui va désormais
modifier le sens coutumier du SI.? Dans le second cas, cela signifierait
une volonté d'afficher, maintenant, l'urbanisme comme le propre
du SI.
Est-ce que, pour autant, les << insuffisances >> du SI,
vues du côté client, se trouveront estompées voire
éliminées à
cette occasion ? L'utilisateur pourrait être amené à se poser
la question. Il sait trop bien qu'en dépit de ses investissements dans
les mea, giga, téra de la technologie X ou du logiciel Y, l'informatique
continue de lui coûter très chère. Et quand un certain après-midi
il doit rencontrer son président et réclame à son DSI la courbe des CA
sur les cinq dernières années, le fait de se voir répondre
qu'il l'aura << sans faute après demain! >> le
rend rêveur... Souplesse et pertinence seront-elles au rendez-vous
des caractéristiques de l'USI. Il n'est pas inutile de rappeler
l'effort louable et systématique de l'informatique pour mettre
au service de leurs collègues la technologie et la formation qui leur ont
permis de remplir aisément leurs tâches. Cette démarche,
répétée, a conduit à ce que l'on a appelé la
<< couverture >> de tous les services de l'entreprise.
Peut-être est-ce avec les mêmes bonnes intentions que la Sécurité
Sociale a réalisé la << couverture sociale >> et les militaires
leur << couverture tactique >> ? On remarque alors que tout
étant << couvert >> ou presque, comment peut-on proposer un USI
dont l'essence même est l'ouverture ? De là l'idée, ou
l'hypothèse de travail, que le passage du SI à l'USI revient
peut-être à inverser la structure : le SI a couvert ce qu'il pouvait
dans l'entreprise classique, maintenant le doit adopter une position
d'ouverture pour répondre aux besoins des entreprises actuelles.
En conséquence, le SI doit se doter d'un support informationnel de
l'organisation de l'entreprise, support qui sera son épine dorsale
(backbone) ou d'une manière plus concise son << hamac >> .
La métaphore du << hamac >> est donc pertinente qu'elle offre
la possibilité de déformation suivant les différentes configurations
que l(entreprise serait amenée à prendre pour assurer sa survie. Cela
pourrait être un des aspects caractéristiques de l'USI.
Ce remplacement de la métaphore de la couverture par celle du hamac est
de nature à faire imaginer les problèmes posés par le passage du
SI à l'USI.
Avec l'Urbanisme comme attribut, le SI s'ouvre à
un plus large contexte (au risque de se perdre...). Dans le passage à l'USI,
les caractères de souplesse et de pertinence sont réinventés
grâce à la métaphore du hamac qui assure la consistance
informationnelle de l'organisation.
1.3.- Des présupposés.
On imagine assez bien les avatars d'une
organisation dont on dirait qu'elle a changé << d'état
d'esprit >> comme ce fut le cas, par exemple, d'une société
spécialisée dans l'étude et la réalisation d'aiguillages pour
Chemins de Fer et qui, désormais, se devait d'élaborer des engins spatiaux.
Mais, l'affaire est tout autre quand il s'agit du passage du SI
à l'USI où, pour l'essentiel, le sujet traité est l'information,
c'est-à-dire de l'immatériel. L'information, l'écrit comme
le discours, est le contexte idéal pour l'association de tous les délires
et le développement de tous ses présupposés. Ne demande-t-on pas à
un jeune publiciste d'imaginer une affiche pour << accrocher >>
l'oeil du passant, place de l'Alma, sur un produit donné, sans ajouter
avec malice, que son effort d'imagination devra équivaloir à celui
qu'il faudrait développer pour arrêter un chaland, s'il veut
réussir ! Dans le domaine des présupposés, il n'y a pas lieu de
réinventer un champ largement exploré par ce célèbre fonctionnaire
des P.T.T. et philosophe de surcroît, G. Bachelard (1970). Le rappel de
quelques éléments des nécessaires << ruptures
épistémologiques >> devrait tenir en éveil la vigilance qu'on
se doit d'apporter à ce travail : - L'expérience première
<< j'ai fait un peu d'informatique et j'entends bien le
problème..! >> , - La connaissance générale : Mallarmé disait
paraît-il : << jouir comme la foule du mythe inclus dans toute
banalité >> . - L'utilité érigée en principe sert
largement à justifier les dispositions les plus étranges - L'extension
abusive d'une image familière : la chose reconnue et admise connue..
- L'obstacle animiste : << C'est en tant qu'obstacles
à l'objectivité de la phénoménologie physique que les
connaissances biologiques, par exemple, doivent retenir notre attention...
aux entraves quasi normales que rencontre l'objectivité dans les sciences
purement matérielles vient << s'ajouter une intuition aveuglante
qui prend la vie comme une donnée claire et générale. >>
Les
spécificités de l'USI comme ses outils informatiques, ses méthodologies,
ses items MOA / MOE, son rapport aux systèmes vivants... pointent déjà
quelques thèmes particuliers de la grille ci-dessus. A titre d'exemples,
comme déjà évoqué dans le paragraphe 1.2.-, s'affirme la tendance
mécaniciste (la boule de billard), la dichotomie du raisonnement, les
chaînes d'actions, la préférence des effets simples et clairs,
la négociation angoissante dans le temps... autant d'indices possibles
pour détecter des présupposés, sans pour autant et systématiquement
en soupçonner les effets latents.
On ne peut oublier que les présupposés
de chacun concourent à la transformation du SI en USI. C'est en quelque
sorte le garant d'une émergence vivante et représentative des
travaux des professionnels et des chercheurs du domaine. Mais, certains
présupposés peuvent marquer une empreinte plus forte par le biais de
l'apparition de répétitions multiples, les campagnes de mobilisation
managériale par exemple, et ainsi réduire, momentanément la
variété des interactions des acteurs. Cela pourrait être
préjudiciable au développement de l'USI. On pourrait alors parler,
selon Varela, d'une << clôture opérationnelle >> .
1.4.- Cadrage de l'analyse de la stratégie de l'USI
Ce travail peut se justifier par les perspectives suivantes :
1.- Ce premier Colloque National de l'Urbanisme des Systèmes
d'Information trouve sa légitimité dans l'évolution
spectaculaire du concept d'entreprise et dans la mission de l'USI
comme moteur d'une nouvelle forme d'approche du développement
technologique possible. Il s'agit d'un << sujet à risque >>
puisque l'USI, par sa fonction, tisse la structure d'information de
l'organisation à un moment donné de son histoire. Ce faisant l'USI
et l'organisation sont conjoints et solidaires dans la capacité de
l'entreprise à satisfaire les besoins de la clientèle.
2.- Un colloque est souvent l'occasion de dresser un << Etat
de l'art >>. L'art de l'USI est issu de la main de l'homme,
c'est donc un artefact selon H. Simon, et en même temps, il est la
trace de l'habileté et de la connaissances des participants qui
s'y sont investis. Bien que la fragmentation de cet art soit encore
très importante, l'USI marque, par la variété des formes de SI
qu'elle peut supporter, des promesses d'avenir qu'il y a lieu de
d'explorer pour l'entreprise. Que ce Colloque soit à la fois
scientifique et promotionnel, ne fait que renforcer la caractéristique
d'ouverture de l'USI et montre déjà que cet << Etat de
l'art >> est le résultat d'un vouloir << tracer son
chemin en marchant >> .
3.- La stratégie de l'USI dont les
chapitres précédents ont révélé la
complexité, ne peut au
mieux s'appréhender, aujourd'hui, qu'à la faveur d'un
essai de modélisation. On présentera dans la suite un
schéma, même
si on le nomme modèle, basé sur la structure linguistique
selon R. Jakobson.
Ce schéma se voudrait, néanmoins, dynamique et interactif,
pour révéler
diverses alternatives de stratégies possibles dans ce délicat passage du
SI à l'USI (risques et limites).
2.- Outillage d'analyse.
2.1.- Bref rappel des idées de R. Jakobson
Là encore, on peut remercier nos collègues qui ont fourni la
matière première de cette recherche à travers leurs articles.
Ils ont su apporter la critique des positions actuelles et faire l'effort
de définir de nouveaux métiers. L'option d'une analyse linguistique
se trouve donc en partie justifiée par ces articles associés au Colloque.
Quelques propos de R. Jakobson sont ici rapportées pour aider à la
compréhension de la démarche. < Parler implique deux opérations
fondamentales : la sélection de certaines unités linguistiques dans
le Code ou trésor lexical commun et la combinaison de ces unités en
unités de plus en plus vastes et complexes, chaque niveau intégrant
ceux qui le précèdent dans un ensemble hiérarchiquement
supérieur :
des phonèmes aux monèmes puis aux mots, des mots aux phrases et des
phrases aux énoncés. Ces liaisons de niveau de complexité croissante
sont régies par des lois phonologiques, grammaticales et syntaxiques de
contrainte décroissante.>
On a l'habitude de représenter deux
axes, l'un vertical, l'axe de la METAPHORE et l'autre horizontal,
l'axe de la METONYMIE. - le premier s'apparente à la sélection,
la substitution, l'opposition, la similarité
- le second s'apparente à
la combinaison, le contexte, le contraste, la contiguité.
On se rapportera ultérieurement à la figure 1,
pour la représentation du schéma ou modèle.
2.2.- Mode opératoire de la recherche
Il n'est pas
inutile de rappeler une fois de plus, ici, que les circonstances dans lesquelles
s'est développée l'informatique (peut-être outrageusement
technologisée), n'ont pas fini de révéler des traces profondes
de frustration et, de ce fait, l'ont incitée à prendre, aujourd'hui,
la position risquée d'une sorte d'OPA sur l'Urbanisme. Si l'on
veut aborder le comment de son éventuelle stratégie (l'USI),
ce n'est pas à partir d'illusoires définitions de plus en plus
réductrices des pôles Urbanisme et SI, mais en essayant d'appréhender
d'une manière globale : - d'une part la vision informaticienne
de l'urbanisme à partir de son statut actuel et - d'autre part en
quoi l'urbanisme suscite-t-il la faveur de ce même groupe ? Le mode
opératoire va donc consister à décrire deux << tableaux >>
qui tiendront lieu, pour chacun des pôles, d'une existence exemplaire.
Ainsi, on rapportera, successivement, en guise du premier tableau l'expérience
d'un jeune urbaniste de terrain témoignant par ses actes de la portée
de sa démarche et, comme deuxième tableau, une saynète qui, sans
unité de temps ni de lieu, transpire l'exercice du pouvoir à travers
les avatars d'un groupe informatique courageux, finissant par prendre en main
sa destiné. On remarquera qu'à notre époque la misologie comme
l'explicite Peter Sloterdijk, fustige le pouvoir alors qu'il est
un élément vivifiant de la société
2.3- Approche globale des
deux pôles de la recherche : l'urbanisme et le
groupe informatique.
2.3.1.- Expérience rapportée d'un
urbaniste de terrain
<< Une brève histoire de notre temps... >>
Nanti de ses diplômes et d'une connaissance actualisée,
un jeune architecte et urbaniste se confronte au relogement d'une
<< poche de squatters >> en plein centre d'une de ces villes
d'Asie du Sud-Est. Là << vivent et travaillent >> quelque
treize mille âmes autour d'une prison désaffectée et quelquefois
à l'intérieur quand un heureux incendie leur en a donné l'accès. Le site ne manque pas d'intérêt. Situé à la limite d'un vieux
quartier espagnole et d'un autre réaménagé à la manière
architecturale des rues de Chicago, ces dix hectares appartiennent à l'Etat.
L'opération de relogement pourrait trouver aisément un financement,
et par la vente des terrains, et par des participations privées. Le
caractère historique, la situation de noeud de transport, la proximité
de facultés (il y en a !) et de centres commerciaux sont
autant d'éléments
attractifs pour le développement du lieu. Depuis une soixantaine d'années
les projets se succèdent. Tout d'abord, à l'initiative de la
municipalité et avec l'aide du F M I., des logements sont construits
en périphérie de la ville. Mais les quelque vingt pour cent qui s'y
sont relogés ont été rapidement remplacés,
autour de la prison, par
le flux incessant des nouveaux arrivants... Sont alors apparus de grands projets
architecturaux. Mais les tours et les bâtiments prestigieux mettaient un
voile pudique sur la négociation du mode de transaction avec les occupants
du terrain... Le prétexte financier permit à la Municipalité de se
dégager de ces offres superbes. Après avoir écarté les modes
<< tabula rasa ou bulldozer >> et en raison du fragile équilibre
des populations en présence qu'on ne peut impunément violenter,
la solution x=0, le statu quo, a été retenue. C'est ainsi que
notre jeune ami a bénéficié, à son arrivée,
de ces exceptionnelles
circonstances de << stabilité >> . Ce n'est pas sans une
certaine condescendance amusée qu'on lui a laissé le champ libre
pour une nouvelle exploration d'urbanité... Après l'apprentissage
historique plutôt aisé, quel n'a pas été la difficulté pour
trouver des documents dont ses profs lui reprochaient toujours la trop
habituelle négligence ? : plans masse, cadastre, propriétés,
réseaux de vie... L'archéologie du savoir n'était
malheureusement pas dans le livre de Foucault mais dans d'innombrables
bureaux d'organismes divers où des gens bienveillants l'ont accueilli
avec l'aide complice d'une interprète astucieuse. Mais ces informations
additionnées et les difficultés quotidiennes désespéraient la
quête de notre ami et tous ces savoirs primordiaux semblaient transformer
son petit carnet de croquis (c'était son cahier des charges, à lui...)
en une suite de doléances. Ce support discret qui lui avait, jadis,
permis de rêver ses folles innovations. Des questions?..., il y en avait !
- comment vit-on à quatre mille familles, officiellement, sans eau? mais,
on finit par entendre parler de nappe phréatique dont la trace aurait
été
perdue, heureusement, par les autorités de la Municipalité...
- où vont les eaux usées ? - comment se fait-il qu'il y ait
de l'électricité (si peu !) ? - comment se développent ces
échoppes, ces arrières boutiques, ces logements où le stockage
des produits est, un jour, remplacé par les grands-parents rapatriés
de quelques provinces << difficiles >> ? - qui construit ces
énormes piliers, ces dalles, ces escaliers à la dérobée ?
- comment se fait, tous les jours, l'approvisionnement en poisson
et légumes frais de quelque soixante mille personnes parmi lesquelles
on note les plus grands restaurateurs de la ville ? - comment se développe
cet << habitat >> avec ses locations pour étudiants ?
- enfin, est-ce que le foncier, les POS, les actes administratifs, les
pratiques de remembrement et de spéculation qui étendent (sans contrôle)
la propriété privée, l'existence de << lobby de syndicats >>
de squatters, sont à prendre en compte dans son projet de l'urbanisme ?
Pourra-t-il concilier ces exigences, inaccoutumées et semble-t-il incontournables,
avec son hypothèse de travail : << Maintenir et reloger sur place
la population de l'îlot pour l'associer au développement de ce
centre ville et bénéficier, en retour, de la dynamique culturelle et
commerciale de ses futures extensions. >>
A la suite de ces longues
prémices, nécessaires pour << sentir >> le climat, le projet
acquiert son cadre dans un scénario en trois actes.
Le premier consiste à reconnaître, au mieux, certains intérêts
des occupants de l'îlot : - l'extension du logement n'est
peut-être pas leur souci majeur (!). Ils souhaitent surtout pouvoir
réinstaller leurs étales à moins de trois cents mètres pour que
leur activité quotidienne (survie des familles) ne soit pas trop perturbée
et qu'ils retrouvent leur clientèle. - des formes de site non extravagantes
pour ne pas se couper du lien social antérieur. - des emplacements de
logement qui laissent aux intéressés la possibilité de concevoir un
<< pas d'extension >> compatible à la potentialité familiale.
Pour répondre à ces conditions, trois types de construction sont offerts
en prenant comme soubassements, trois des seize << rayonnements >>
qui constituent la trace de l'ancienne prison. On y construit, en dur,
- des pièces avec étales et arrières boutiques,
- des amorces, en R.d.C, de logements avec cloisonnements ultérieurs possibles,
- des ensembles avec premier étage et << coursives >>
permettant les échanges et les négociations entre les occupants
et avec les propriétaires.
Après cette ébauche de construction
ouverte le second acte vise à déplacer, astucieusement, deux cents
premières familles!.( lesquelles, comment, le temps ?...). Le travail
de l'urbaniste va consister surtout à observer, << comprendre >>
et... essayer de modéliser les interactions des familles sur le lieu qui
leur a été affecté (ce n'est sûrement plus le métier de
l'architecte, est-ce encore celui de l'urbaniste ?). Durant le ou les
mois à venir (quel critère pour définir ce temps de stabilisation ?),
le bon observateur détecte les tendances émergentes et réinjecte,
éventuellement, des éléments de constructions complémentaires.
Autrement dit, l'effet interactionnel des trois types de construction
doit conduire à l'élaboration des dispositions les mieux
adaptées aux nouveaux occupants et préparer le troisième acte.
Ce troisième acte semble superflu, au point actuel de la démarche,
puisque l'on possède maintenant assez d'information pour commencer
une construction à grande échelle qui, sans être contigu
resterait voisine des précédentes. Mais le problème n'est pas
dans la reproduction du même ou dans le choix d'un travail primé
au concours de 1976 : << The international design competition for the
urban environnement of developping countriesĘ >> . Le problème de
notre jeune urbaniste est de passer de cette première représentation
quasi statique qui gît dans son petit carnet de croquis à un modèle
dynamique d'accompagnement du relogement et du développement de la
population des squatters.
Son travail est de faire comprendre aux
différents acteurs << la circularité organisationnelle du
système >> . En d'autres termes, l'amélioration progressive
de l'habitat de l'îlot développe le potentiel d'activité
des occupants qui, à son tour, favorise la construction en périphérie
d'immeubles privés et de centres commerciaux, spéculant sur
ces premiers développements. Ce faisant, l'action de la municipalité
peut se développer, en ce lieu, par l'élaboration d'un noeud
de transport (métro aérien, bus) qui s'inscrit dans le plan
général de la ville. Elle améliore ainsi (sans coût
complémentaire) l'accès au quartier et fixe la population
d'origine. Celle-ci est alors, économiquement, en mesure d'accéder
à un niveau plus élevé de son habitat. Le cycle est amorcé.
Ce << moteur générique >> de l'habitat semble a priori
opposer la démarche de l'urbaniste à celle de l'architecte.
Il s'agit simplement d'un des aspects qui différencie l'architecte
(Frank Fuery) à qui l'on demande de construire le Musée Guguenheim
à Bilbao et l'urbaniste que l'on met en face d'une population
à reloger ou d'une ville à développer... Dans les deux cas
l'expertise - métier, requise, est la même. Dans les deux cas le
génie de l'observation et de l'écoute distingue les personnes et
non leur étiquette. Il n'y a pas de bon grain et d'ivraie, il y a des
faiseurs de récolte.
2.3.2.- Saynète pour un groupe informatique.
<< Un scénario comme un autre... >>
L'introduction du premier groupe d'informaticiens dans l'entreprise
n'a pas été sans quelques remous. Nul ne savait, au juste, quelle place
il leur fallait attribuer. Ni ouvriers ni cadres et pourtant précédés
de quelle aura !, c'est le DG qui a levé l'ambiguté en
s'attachant personnellement le groupe. Cette stratégie confortait
son image de marque, évitait quelques remarques chagrines et lui assurait
un contrôle du groupe dans le cas de velléités contingentes.
Choix judicieux puisqu'en évitant tout conflit avec le reste de
l'organisation le DG s'initiait, comme il l'entendait, au langage
de ce nouveau paradigme, pendant que le responsable informatique, agréablement
baigné dans cet entourage prestigieux, lui conseillait des développements
<< intéressants! >>. Enfin, bien accueillies par la magie du discours
sur les techniques nouvelles, les perspectives de développement semblaient,
pour notre informaticien, parfaitement s'intégrer à la stratégie de
l'entreprise dont il s'abreuvait quotidiennement. Les DRH finissent
toujours par trouver le moyen de << ranger leurs petits soldats >>
pour prévenir les déconvenues qu'apporte, régulièrement,
la discussion budgétaire sur les salaires tant avec le patron qu'avec
les syndicats ou autres organismes tutélaires. Et, de ce fait, le responsable
informatique s'est retrouvé dans la lice du << râteau >>
des directeurs. Beaucoup se trouvèrent satisfaits de ce nouvel ordre qui
rendait l'harmonie à la pyramide hiérarchique. Beaucoup peut-être,
sauf le groupe informatique privé brutalement de cet appui symbolique qu'est
la proximité du << perchoir >> . De plus en s'identifiant
progressivement aux destinées de l'entreprise, le directeur de l'informatique
se trouva fort dépourvu quand il fût contraint, comme ses collègues,
de justifier une production conforme au budget qui lui avait été confié.
C'était sans doute ignorer la formidable capacité d'ingéniosité
de ce groupe qui trouva, aisément, dans la foule des fournisseurs en
informatique, de très larges appuis : ceux-là mêmes qui entretenaient
les DG de leurs innovations à venir savaient en susciter les convoitises...
Force est de constater que ce pouvoir, retrouvé, du groupe des
informaticiens se fait reconnaître comme << état dans
l'état >> tant par le prestige des lieux de ses activités que
par les salaires et avancements qui lui sont accordés Mais, comme tout
système organisé, l'entropie s'est développée, même dans
ce groupe. En dépit des fournisseurs de renom auxquels ils étaient adossés,
le couperet finit par tomber, sous la forme d'un bruit de couloir DG :
<< votre informatique coûte cher! >> . En décidant aujourd'hui,
au niveau des groupes, d'avoir un système unique, performant et susceptible
de les informer sur le jeu possible d'OPA, les Directions Générales prennent
le pas sur les DSI et réduisent le groupe informatique à des exécutants
en dépit de leur niveau : la mission est claire, mettre en place pour que
<< çà marche >> avec les experts qui vont bien... et les autres...
On assiste ainsi, à l'avant-dernière scène de ces avatars informatiques.
L'apparition, parmi l'armada des systèmes de gestion de l'information
(on ne parle déjà plus que de logiciels) des cuirassiers appelés : ERP.
Chaque groupe s'enorgueillit d'en disposer et de tenir, maintenant, les
affaires bien en main! Anecdote : Il y a plus d'un an à Walldorf,
berceau de SAP, on réduisait les effectifs et chacun, à sa mesure, devait
se tourner vers plus d' << ingénierie des besoins du client >>.
D'après les témoins, cette stratégie apparaissait tout à fait
normale et, dans le Monde informatique nunméro 70 du 21 juin 2 002, il est noté
que SAP se montre serein.... Est-ce que cette société, également,
n'aurait pas déjà réfléchi et oeuvré
dans la perspective d'un
urbanisme des SI ?...
En disposant, maintenant, du portrait robot d'un
certain urbanisme et d'un non moins certain groupe informatique et selon ce
qu'en aura ressenti le lecteur sans pour autant lui imposer des définitions,
la stratégie de l'USI devrait apparaître dans sa
représentation dynamique de la figure 1 ci-après.
3.- Essai de modélisation
3.1.- Représentation
Figure 1. Essai de représentation du complexe
interactionnel :
Le groupe informatique et sa vision de l'urbanisme.
3.2.- Dynamique proposée pour le schéma de la figure 1
La stratégie globale dans laquelle s'inscrit l'USI consiste en
un << rapprochement circulaire et réflexif >> de << A >>
(axe support du SI) et de << B >> (axe support de l'Urbanisme).
Le groupe informatique << A >> , poursuit sa démarche technologisée,
par contiguité pourrait-on dire, puisqu'à
chaque apparition de nouveautés
sur le marché, il en traduit l'opportunité en projets offerts à
son entreprise. Il va de soi que ces projets sont aussi le << moteur de
son désir >> . De ce fait et néanmoins, il participe à
l'amélioration des conditions de réalisation des tâches de ses
collègues. C'est ce qu'on a appelé la démarche de
<< couverture >> informatique : le développement global se
faisant par couches successives. Ainsi A se trouve très proche de l'axe
de la métonymie (voir définition plus haut), on dit qu'il fonctionne
par contiguité. Son activité pourrait s'assimiler (sans misologie!) à
la reproduction du même. Pendant ce temps, sa vision de B (l'urbanisme)
qui est assez proche de l'axe métaphorique, témoigne d'un ensemble
d'éléments non encore totalement identifiés quant à leur
représentation, définition, outils, métiers, modèle... etc
La stratégie de A, parce qu'il est interpellé par l'urbanisme,
consiste donc à s'approcher de B << pour y voir plus clair >> .
Cette stratégie est cependant très complexe et présente de suite des
difficultés. - Si A s'éloigne de l'axe métonymique c'est
qu'il accomplit une transformation sur lui-même en prenant en compte
certains de ses préjugés par exemple (voir le paragraphe 3.3.3.-). Mais
A ne peut s'éloigner indéfiniment, car toute transformation a une
limite. L'axe médian du schéma est un repère purement géométrique.
En effet, il n'y a pas de discours << équilibré >>
c'est-à-dire également éloigné des deux axes, même pas
les robots!... Mais selon la combinaison des caractères des acteurs du
groupe on aura affaire à une tendance métaphorique ou métonymique,
située plutôt vers la région médiane, d'un côté ou de
l'autre. - S'approchant de B, la compréhension de A s'affine,
autrement dit des signifiants (mots spécifiques de B) apparaissent et se
màle au discours de A. Cela signifie que B se rapproche de l'axe vertical
métaphorique au fur et à mesure que A se rapproche de B. Bien entendu on
peut imaginer que les vitesses sont différentes... (sinon pas d'USI!)
- Il faudrait analyser par des interviews, par exemple, la nature des
rétroactions de la vision changeante de B sur A. Certains signifiants
pourraient révéler à A des faiblesses, manquements ou autres
difficiles à gérer : solidité de positions, savoirs, méthodes...
Enfin, dans le schéma, << A -B >> il faut bien comprendre
que cette sorte d'état stationnaire représente l'USI en
fonctionnement, c'est-à-dire dans la nouvelle approche des systèmes
d'information pour les organisations complexes déjà évoquées.
Mais cette stratégie de rapprochement est fragile et, à tout moment
peut se défaire... On comprendra alors que l'USI n'est pas la
dernière mode d'un organigramme pour réussir des marchés mais pour
faire face à des situations inédites qui sont à l'image des
problèmes de notre temps. Néanmoins, l'association USI, en dépit
de son caractère sans doute éphémère, offre une grande richesse
à exploiter pour la classe de ses protagonistes.
En bref, la
stratégie << A - B >> (urbanisme des SI), appliquée à
la situation actuelle, peut porter ses fruits mais avec l'effet de puissants
leviers qu'on suggère autour des domaines suivants : le juridique
(transformation de la relation avec le client, type de contrat ouvert, action
de conserve...) le sociologique ( organisations vivantes,
aspect néguentropique -
effet hamac -) et la mathématique (expertise logiciel, robotique,
langage universel ).
3.3.- Questions pratiques pour l'amorce d'une dynamique stratégique possible
3.3.1.- Du << non dit >>
Pourquoi, en effet, un groupe A, assez autonome par le pouvoir qui lui est
reconnu, cherche-t-il à s'approprier le langage (et peut-être les
modèles?) d'un autre groupe B ? Au delà des justifications rappelées
au paragraphe 1.1. : évolution de l'entreprise, effet de mode, mission
originale de l'USI, volonté affirmée d'une autre prise en compte
des besoins de l'utilisateur,... on est conduit à penser qu'il y a
du non dit dans ce discours et que la volonté d'identification
de A à B témoigne plutôt d'un symptôme somatique (soma = corps
des informaticiens - A -). C'est-à-dire que l'effort d'investissement
de A pour se maintenir dans un environnement difficile est détourné au
profit d'un autre effort qui est celui de l'identification à B.
Ainsi, A fait l'économie d'une représentation de soi sans doute
peu satisfaisante actuellement. Une représentation que B joue à sa place,
dans l'image inversée du fantasme de l'urbanisme. De quelle situation
pourrait-il bien s'agir ? Il est possible que les circonstances bouffonnes
et quelque peu forcées évoquées à la fin de la saynète n'excède
que de peu la vérité de A (?) : les DG, en imposant des ERP, réduisent
le groupe informatique, comme les autres du reste, à des techniciens
exécutants dans un management par objectifs sans équivoque.
3.3.2.- Couverture / SI versus hamac / USI
C'est peut-être
le << décorticage >> d'une telle situation qui conduirait
à l'amorce d'une dynamique stratégique qui, s'appliquant à A,
lui permettrait de réaliser l'effort de basculement et donc de
transformation nécessaire au pesage à l'USI. A partir de là,
le regard sur soi, du groupe informatique, est plus aisé. Par exemple,
en quoi ce couple de métaphores en opposition : la << couverture >>
et le << hamac >> dénote-t-il des habitudes et des procédures,
concernant le SI, qu'il y a lieu de convertir ou de développer avec l'USI ?
Chaque << pas technologique >> n'a-t-il pas un coût global
presque équivalent aux travaux d'interfaçage (le matériel nouveau
et sa prestation n'entrant que pour une faible part). Demain la métaphore
du << hamac >> , c'est-à-dire la capacité du groupe informatique
à épouser les formes mouvantes de l'organisation, assurera tout
naturellement la souplesse, la réactivité et la pertinence de l'information
produite par l'USI. Le temps accomplira son oeuvre..
3.3.3.- Comment faire << décoller >> (A) de l'axe de la
métonymie ?
Comme indiqué, déjà
plus haut, la spécificité
de la métonymie est la combinaison. Ce terme fait référence à
l'idée de lien, de contexte. Les termes combinés sur cet axe entretiennent
entre eux des rapports de contiguité, de lien, de concaténation
(catena : chaîne). Pour que A s'éloigne de l'axe métonymique,
on peut imaginer certaines dispositions, par exemple : - des procédures,
comme un jeu de questions, pour élargir le contexte des applications. Les
liens de contiguïté se distendent, d'autres liens apparaissent plus tenus,
plus fragiles, à partir desquels le choix des possibles s'accroît.
Mais on sait que cette variété émergente a des limites et peut amener
des dysfonctions propres à l'approche de l'axe métaphorique.
- dans une autre perspective et sans pour autant renier le passé,
l'attachement moins prononcé à l'existant réduit la formation
de présupposés précoces et tenaces surtout quand, partant de ce qu'on
croit comprendre, on en tire par le << bon sens >> un cahier des charges
<< béton >> (selon l'expression consacrée). La combinaison
d'éléments existants n'est pas une innovation. Pour qu'il y ait
innovation, il faut qu'il ait rupture d'un contexte. - par le biais de la
contiguité, on justifie souvent l'utilisation d'un matériel ou
d'un programme << qui a fait ses preuves et ne viendra en rien
perturber le système existant! >> . On reconnaît bien là, l'amorce
de cette méthode des petits pas qui ravit les précautionneux et assure
leur adhésion, mais à quel prix pour ceux qui, ultérieurement, auront
la charge du système. Il est inutile de dire combien cette
<< méthode >> , purement séquentielle, est à l'opposé
de la mise en oeuvre de l'USI. Méthode qui n'engage pas la
clientèle à recommencer l'expérience. Ne faut-il pas compter
1 pour garder un client et 7 pour en conquérir un autre ?! - à partir
de la naissance de la grille des métiers de l'informatique qui ne manque
pas de révéler la concaténation ( mot barbare qui, à l'origine,
marquait le territoire de l'informatique) en entreprise. La
prégnance << séquentielle >> (encore) de cette grille est
si forte qu'un lot d'historiens, de sociologues, de mathématiciens,
de biologistes rompus à l'informatique n'ont jamais pu y être
accueillis. Il va sans dire que l'évolution, ou la révolution (comme
celle d'une planète) de cette grille marquera nécessairement un
changement d'état d'esprit avec son entrée dans l'USI. Il
faut bien, un jour, arrêter le bavardage sur la transdiciplinarité et
la faire entrer dans la pratique.
Tous ces exemples n'ont d'autre
but que de montrer qu'on peut préparer les voies d'une dynamique
stratégique de l'USI. Mais chacun se devra de préparer son terrain
c'est-à-dire de déterminer les critères de transformation
(aptitude à la transdisciplinarité, par exemple) qui correspondent
à sa vison actualisée de l'urbanisme comme << analyseur >>
de sa propre destinée.
4.- Réflexion sur le passage à l'USI.
Il est sans doute un peu décevant de ne pouvoir tirer de ce travail
une << recette stratégique >> toujours utile à promouvoir
quelque gloire ultérieure.. Ceux qui ont eu le courage de suivre la
démarche de cet article sont bien conscients qu'on ne peut faire
l'économie d'une reconstruction professionnelle et personnelle si
l'on veut entrer dans la dynamique du modèle proposé. Parler
d'une stratégie possible pour l'USI, c'est annoncer aux quelques
enfants impatients, groupés autour de soi qu'on va passer un gué.
Tous les ingrédients sont là et pourtant il faudrait leur dire : que
l'eau froide, les pierres qui émergent sont glissantes, il y a celle
qui peuvent vous porter et les autres..., qu'il ne faut pas mouiller
ses habits, qu'il y a les astucieux (observateurs des autres), les
téméraires, ceux qui pleurent pour se faire porter, que les cris du
succès ou de l'échec sont des appels à la solidarité, au sens
commun, à la joie respectable d'avoir trouvé seul, à la demande
d'encouragement, d'explication ou d'apprentissage... etc....
Qu'est-ce que la stratégie sinon le produit d'une patiente observation
du << client >> , de l'écoute de sa palabre ou de son discours
de tribun. La stratégie c'est aussi l'accueil comme une action vers
quelque chose malgré des circonstances difficiles, c'est Cordélia
dans le Roi Lear : << she stoops to conquer >>.
L'Urbanisme
est cette opportunité (C. Longépé 2 002), à
notre portée, pour
<< réinventer la relation MOA / MOE >> , c'est aussi une chance
pour s'ouvrir à des contextes inhabituels en réfléchissant et en
élargissant les exigences des métiers de l'informatique.
5.- Au delà d'une conclusion
Un certain nombre de remarques ont émergé en marge ou non de ce
travail. On aimerait en faire part.
1.- L'USI n'est pas une
innovation, mais le fruit d'une réaction à une situation difficile
vécue par le monde de l'informatique. Comprendre la situation c'est
se mettre dans des conditions favorables pour concevoir une stratégie pertinente.
Comprendre c'est donc essayer de modéliser en pensant que le modèle
n'est qu'une représentation de ce à quoi nous faisons face.
2.- La stratégie de l'USI n'est pas à confondre avec la stratégie
de l'entreprise Il peut y avoir cohérence mais pas forcément identité.
Ainsi, il apparaît que la transparence de la stratégie de l'entreprise
demandée comme préalable au développement de l'USI n'a pas lieu
d'être retenue.
3.- Il semble que les recherches à poursuivre sont plus sur le versant
de la mission de l'USI que sur celui de sa définition. On explorera,
ainsi, plus aisément la variété des métiers de l'informatique.
4.- Si l'USI peut être considéré comme l'épine dorsale
(backbone) de l'organisation de l'entreprise, on préférera la
métaphore du hamac qui en épouse la forme (souplesse) et en préserve
le contenu (pertinence) 5.- Le passage d'une logique à une autre
reste à analyser soigneusement à travers les expériences
pratiques MOA / MOE puis celles du passage SI / USI. La question de la
transdisciplinarité se pose à nouveau.
6.- Le << client-utilisateur >> est la source d'un contenu
minimum pour élaborer le passage du SI vers l'USI, de là, la nécessité :
- de capter et comprendre sa demande infinie... (espace de liberté
d'expression) - - de connaître le pas d'adaptation (ou de
transformation) supportable - de passer du contrat (satisfaction de celui
qui paye) à toutes autres dispositions impliquant un travail en commun et
limité dans le temps (partenariat, troc, échanges immatériels...).
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BIBLIOGRAPHIE
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analyse d'une politique de croissance et d'expansion - >> .
Edition originale << Corparate Strategy >> , 1965 -
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BACHELARD Gaston << La formation de l'esprit scientifique -
les obstacles épistémologiques >> Editeur, J. Vrin, 1970.
BAILE Serge << L'alignement du partenariat d'affaire sur le
partenariat électronique avec l' EDI - étude empirique du
succès avec la méthode des équations structurelles. >> - Article
associé au Colique sur l'USI du 24 juin 2 002 à la Sorbonne.
BARSOTTI Bernard : << La représentation dans la philosophie
contemporaine >> ,Ę Edition Ellipses, octobre 2 001.
DELEUZE Gilles : << Logique du sens - 12 ème série sur le
paradoxe - >> ,Les Editions de Minuit Paris 1969.
DETOEUF Auguste : << Propos de O.L. Barenton, confiseur >> ,
Edition de Tambourinaire, Mai 1955. JAKOBSON Roman << Essai
de linguistique générale - I. Les fondations du langage >> -
Editions de Minuit, 1978 - pages :.42 -66. LEVY Pierre << Les
technologies de l'intelligence : l'avenir de la pensée à
l'ère informatique >> , Editions La Découverte, 1990
LONGEPE Christophe << L'urbanisme : une opportunité pour
réinventer la relation maîtrise d'ouvrage/ maîtrise
d'oeuvre >> - article associé au colloque USI du 24 juin 2 002
VARELA F.J. et HAYWARD J.W. << Passerelles >> ; Entretien
avec le Dalaï-Lama sur les sciences de l'esprit -
Edition Albin Michel, avril 1995.
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Edition du 30 décembre 2002.
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